1.
mémoires brisées
La Corée ne finit pas de nous étonner. Nouvelle surprise
en date : 2009, Lost Memories. Le début du film nous place d'entrée
dans l'ambiance en relatant l'attentat contre le consul japonais en Corée
en 1910. L'histoire présente un futur modifié où la Corée est restée intégrée
au Japon, où le consul survit à l'attaque, où le Japon n'a pas rejoint
les forces fascistes, où le Japon membre permanent de l'ONU a organisé
la coupe du monde 2002. C'est dans ce contexte que deux policiers l'un
d'origine japonaise l'autre d'origine coréenne enquête sur une mystérieuse
organisation terroriste les uraeseijin, nationaliste et ultra violente.
Le film joue sur tous les registres : film d'action pur dans la tradition
asiatique marqué par quelques moments d'anthologie (ex. l'attaque du centre
culturel japonais de Séoul, le cargo). Nous retrouvons la pâte des coréens
très inspirés par Hong Kong et John Woo (l'attitude du policier coréen
rappelle Chow Yun Fat) et moins inspirés dans leur volonté de copier les
blockbusters à l'américaine quitte à forcer sur les effets de style (quelques
ralentis sont inutiles, fusillades à peine crédibles). C'est également
un film policier extrêmement bien ficelé. En quête d'un mystérieux artefact,
les 2 policiers se retrouvent plonger dans un scénario à la Matrix,
découvrant au fur et à mesure que leur passé a été volé, modifié. Nos
protagonistes sont à la fois Indiana Jones et Neo, néophytes, velléitaires,
dans leur recherche du temps perdu. La fin du film rappelle même Retour
dans le futur quand nos deux héros-amis-ennemis s'affrontent pour
modifier ou conserver l'Histoire. Le pari scénaristique est osé mais parfaitement
tenu. Il s'enrichit même d'un vrai travail des personnages : d'un côté
le coréen assimilé qui en a oublié ses racines, de l'autre le japonais
intègre dont la famille est originaire d'Hiroshima et soumis à un dilemme
: soutenir son ami dans sa quête de la vérité au risque de perdre sa femme.
Le traitement des japonais évite l'écueil d'un nationalisme exacerbé et
évite même de juger leur attitude. Ils sont aussi victimes d'un passé
qu'ils ne revendiquent pas et auquel ils ne peuvent échapper qu'en poursuivant
une injustice. Seul bémol mais de taille au film, le traitement des terroristes
présentés comme des libérateurs. Le propos est ici contestable : l'assassinat,
les attentats ne sauraient justifier une cause aussi bonne soit-elle et
assurément le réalisateur n'a pas totalement dominé son propos.
Hervé
L.
2. Un film à oublier
Si le cinéma coréen est prolifique et souvent de qualité,
il produit aussi de très mauvais films : ce 2009 en fournit
un parfait exemple. Vaguement inspiré du maître du haut
château de Philip K. Dick (qui doit se retourner dans sa tombe),
ce film se contente de dévider un scénario cousu de fil
blanc, dont l'excellente idée de départ est totalement gâchée
: aucun thème politique n'est développé, aucune réflexion
sur l'histoire de la Corée n'est ne serait-ce qu'esquissée.
Les personnages sont caricaturaux, la mise en scène est affligeante,
le réalisateur réussit à rendre interminables les
scènes d'action, et le discours sous-jacent est profondément
déplaisant, véhiculant un nationalisme exacerbé totalement
déplacé avec une parfaite mauvaise foi, bien relevée
par Hervé. Mais Je serai bien moins indulgent que lui. Voilà
un film à oublier très vite !
Laurent
G., vu en 2004
|