Baby Cart 3 - dans la terre de l'ombre
1974
Japon
réal. : Kenji Mizumi
Avec : Wakayama Tomisaburo

 

Ce troisième volet marque la fin du premier cycle des aventures du bourreau déchu et l'aboutissement du travail de Misumi. Plus que les 2 premiers, il symbolise le travail de Misumi de reconstruction du film de sabre. L'histoire présente une intéressante opposition d entre Ogami et Gambé samouraï déchu et dépressif en quête du véritable sens du Bushido. A la fois jumeau et opposé, les 2 hommes traversent le film entre duels reportés et final haletant. Ogami prend encore plus le visages de l'ambiguïté : pauvre diable errant et maître d'armes. Antithèse du bushido (il vend son art pour 500 pièces d'or) et plus pure expression de ce code ancestral (cf l'exécution quasi mécanique des ennemis sans passion ni réelle haine). Le film propose une vision très contradictoire de ce code d'honneur et profite à merveille du parcours opposé des deux samouraïs. Ethique du guerrier contre volonté de survie, Ogami et Gambé jouent une partition détonante, outrancière. Le travail de Misumi reste irréprochable. En tout point son film cultive l'ambiguïté. Il possède en effet la beauté contemplative des œuvres d'Ozu (citons par exemple le plan sur le monde de la forêt ou le paysage des collines désertiques)°. En même temps Misumi multiplie les explosions de violences quasi sauvage (l'exécution des 2 voyageuses par Gambé). Volontairement outrancier le style est efficace. Il recèle même une part d'intemporel, sorte de témoignage de cet esprit des seventies. Misumi termine son travail de déconstruction en rejetant la dernière règle du film de sabre : l'absence d'armes à feu. Cette fois le film lorgne volontiers vers le western spaghetti lors de la scène mythique du désert. Ogami utilise arcs, sabre revolvers et mitrailleuses pour éliminer ses assaillants. Misumi n'a jamais caché son admiration pour le travail de Sergio Leone. Son film possède l'humour décalé de western italiens. Humour rehaussé par une touche franchement James Bond dans l'utilisation de gadgets et d'un landau qui rappelle les bolides de l'agent 007. Misumi boucle en trombe son premier volet. Le chanbarra ne s'en relèvera pas mais le 7 art vient d'accueillir une nouvelle étoile.

Hervé L., 2005

 

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