Claque made
in Hong Kong
Série datée, Histoire de fantômes chinois n'en reste pas moins une expérience
visuelle unique produite par le surdoué Tsui Hark. Digne du Zu du maître
Tsui, Histoire de fantômes a marqué l'entrée fracassante du cinéma asiatique
dans l'univers occidental. Retour sur l'alchimie d'une bombe. Le 1er opus
a pas mal vieilli au niveau des trucages (digne de Brain Dead). Pourtant
il fascine par sa conception chinoise. Romance mêlée de magie et de fantastique,
le film raconte l'amour impossible entre Lin Tchiao Sin, jeune scribe
et une princesse fantôme qu'il cherche à tout prix à ramener. Les deux
acteurs sont très touchants. La naïveté de Lin personnifiée magistralement
par Leslie Cheung tranche avec la beauté fataliste de Joey Wong. Bien
avant que le monde s'extasie devant Zhang Ziyi, Joey Wong hypnotisait
les foules et rappelait toute la magie de l'Orient. Leur idylle est au
cœur du premier volet teinté de cet humour "chinois" qui à la fois brise
le rythme et renforce les sentiments. L'esthétique de la photographie
insiste sur la passion folle et sans espoir entre ce deux grand naïfs.
Mais point de mièvrerie à l'américaine, le réalisateur à l'image de The
Lovers ne se prive d'insuffler une touche de parodie/comédie à chaque
scène romantique. Et comme ses acteurs ne sont pas les 1er venus, le résultat
est grandiose. D'autant que son histoire se pare de fantastique et de
fantômes. Les moyens sont limités mais exploités à merveille : le mise
en scène est à la fois très esthétique, efficace grâce à une utilisation
judicieuse de la lumière et des décors. Et pour couronner le tout, le
film met en scène le personnage culte de la série : le vieux moine chinois
Yin aux pouvoirs importants (repris par Tarantino dans Kill Bill volume
II) pourfendeur de démons et gaffeur.
Le 2è opus repend les ingrédients (amour/surnature/comédie) du 1er en
plus spectaculaire en plus jubilatoire. C'est à mon avis le plus abouti
des 3. Le romantisme moins présent laisse la place à une débauche de scènes
d'actions. Le cadrage est parfait, la caméra nerveuse, les effets assez
jolis malgré les années. Le moine est au summum de sa forme, il pousse
des " poyé polomi " à tout bout de champs, fracasse des montagnes, plane
sur des sabres volants ; le chevalier pourfendeur de démons affronte un
bouddha géant maléfique, traverse le sol, enflamme le soutras ou fait
exploser la moitié d'une forêt. Les démons se multiplient, volent de branches
en branches ou s'incarnent dans un palais gigantesque. Les affrontements
sont dignes des meilleurs films d'épée. Ajoutons que la note d'humour
est toujours au rendez-vous : quiproquos amoureux, erreur sur la personne
(le scribe devenu leader de rébellion), formule magique mal écrite, scènes
fantastiques pas très ragoûtantes mais jubilatoires (le restaurant cannibale
clin d'œil à Tsui Hark, le baiser enflammé du moine à la femme envoûtée
!!!). Le tout servi par un casting étoffé et de haute volée. : Michelle
Reis en sœur de Joey Wong, c'est du lourd. Difficile de ne pas succomber
à la vague de folie.
Le 3è opus n'égale pas le précédent. Il reprend les ingrédients de la
série : action débordante, mage volant, fantôme omniprésent. Le scribe
est cette fois devenue moine d'où quelques grands moments de frivolité
quand surgit la fantôme. Petit plus de cette opus : l'érotisme. Joey Wong
est tout simplement ensorcelante dans son drapé rouge : la toute première
scène du film (le bain des démons) est à classer. Le tout reste agréable
d'excellente facture. Sans être l'épisode phare il clôt avec qualité une
série monstrueuse.