C'est un documentaire
où sont filmés les vrais personnages par Mariana OTERO, une des filles
des peintres Clotilde VAUTIER et Antonio OTERO ses parents. Clotilde
est morte d'une IVG clandestine réalisée par elle-même après refus d'amis
et connaissance du milieu médical de l'aider. C'était en 1968 : elle
avait 28 ans !
Officiellement Clotilde est morte d'un appendicite-péritonite. Seul
son mari savait et, sous le poids d'une énorme culpabilité à l'époque,
n'a pu en parler. Ce fut un sujet tabou dans la famille jusqu'à ce qu'Isabel
pose des questions, très tardivement parce qu'ayant intégré inconsciemment
le tabou familial. Le film retrace cette démarche de découverte de la
levée du secret et la libération qui en résulte pour tous (sauf pour
la mémé je crois, qui ne saura jamais rien parce qu'elle serait incapable
de porter cette révélation).
C'est affreux : tu ressors là avec une stupeur quand tu songes que 68
c'est pour nous encore très proche ! Nous qui aimons la vie que nous
avons portée étions complètement sous le choc, ignorant la réalité de
ce que vivaient réellement certaines familles. Pourquoi cette levée
du tabou a-t-elle fait l'objet d'un film ? Ne suffisait-il pas de la
réaliser en famille ?
Sans doute pour que les jeunes connaissent cette page d'histoire tragique,
elles qui peuvent aujourd'hui bénéficier d'une IVG médicalement assistée,
du moins en principe et au moment où se débattent les droits des femmes
musulmanes. C'est bien filmé, beau et lent, symbolique par moments (le
voyage, le trou noir entre autres). Les personnages sont très naturels.
Ce n'est pas triste, mais pesant. C'est l'histoire d'une libération
douloureuse mais salutaire dont Isabel et Mariana sont les auteurs vivantes,
graves et gaies.
Michelle
G, vu à Rennes en octobre 2003
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