L'HISTOIRE
Quarantaine bedonnante, bon policier devenu brutal, mari infidèle, amant
peu performant, père de deux garçons (fumeurs de hashich), Leon Zat traverse
une grande crise existentielle. A ses côtés, sa femme subit la crise avec
fracas et se réfugie auprès des conseils avisés d'une psychologue. Cette
dernière est elle-même perturbée et ne se remet toujours pas de la mort
de sa fille, assassinée deux ans plus tôt. Une nuit pluvieuse, elle disparaît
après avoir essayé en vain de joindre son mari (dont le rôle est passionnant).
Leon Zat mène l'enquête et mêle alors tous les personnages du film (époux,
amants, voisins…passants..).
1.
Ce film se situe à la frontière entre le bon polar classique à rebondissements,
et le véritable drame psychologique. On assiste à une chronique de l'enfer
du couple (film à déconseiller à toute personne qui hésite à s'installer
en couple pour cette rentrée..).
Un peu de vocabulaire…Lantana : " arbuste tropical qui dissimule
des ronces broussailleuses sous des fleurs multicolores ". Nous sommes
en plein dedans…chaque personnage, aussi beau soit-il, cache une amertume
(voire même parfois du dégoût) sur sa propre vie, avec un mal être profond.
Ainsi, tous les personnages apparaissent comme des âmes seules, perdues
dans la vie/ville de Sidney. Ce décor pseudo tropical semble d'ailleurs
bien aider le réalisateur à créer une ambiance stressante, voire suffocante
(surtout si la clim. de votre salle de ciné est en panne, en plein mois
d'août).
Après avoir quitté le monde du long métrage, en 85, avec Bliss , au profit
du monde de la pub, Ray Lawrence nous revient sur le grand écran en faisant
preuve d'une parfaite maîtrise de ses personnages (si si, parfaite, soyons
fous) et d'une bonne direction d'acteurs. De fait, on regrette un peu
les rôles moins approfondis des femmes (beaucoup plus stéréotypés). Ray
Lawrence et Andrew Bowell nous livrent donc ici un beau bijou…et si certains
lui reprochent son manque d'originalité, en n'y voyant qu'un film de plus
dans la série des Short Cuts, American Beauty, les Robert
Altman…je leur dirai juste que parfois, le manque d'originalité, ne reste
pas une critique suffisante pour démonter un film qui reste l'un des meilleurs
de ces derniers mois… .
Valérie-Anne
2.
Pour aller dans le sens de Valérie-Anne, je recommanderai moi aussi
cet excellent "polar", même si l'on hésite à
employer ce mot devant ce film hybride mais totalement maîtrisé.
En effet l'intrigue criminelle n'est qu'un vecteur habile pour nous faire
découvrir la complexité de ces êtres qui tentent tant
bien que mal de vivre à deux, malgré le mensonge, la trahison,
la solitude...
J'ai apprécié la très grande rigueur (voire l'austérité)
de la mise en scène, qui ne s'écarte jamais du cadre défini
par l'intrigue. Ray Lawrence tient son sujet de bout en bout, dans un
rythme parfait qui ne sacrifie pas à la violence et aux rebondissements
trop souvent téléphonés des polars classiques.
Enfin, ce n'est pas faire injure à Lawrence que de le comparer
à Altman : l'aspect choral que prend le film, à travers
la peinture des différents couples, fait en effet penser aux méthodes
de l'auteur de Short Cuts ; Lantana n'en possède
pas l'ironie mordante, mais là n'est pas la question : le réalisateur
poursuit sa propre exploration des êtres, dans un style plus lent
et plus sombre qui ne doit rien à personne, pour notre plus grand
plaisir.
Laurent
Goualle, vu au Méliès à Pau en 2002
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