1.
Si j'avais été très touchée par Tout sur ma Mère, et très émue,
voire bouleversée, par Parle avec elle, je crois que le dernier
film du grand Almodovar m'a un peu déçue. Je dis "je crois" car, en sortant
de la salle, je ne savais qu'en penser, je ne pouvais dire si j'avais
ou pas aimé. J'avais, certes, passé un bon moment, apprécié les acteurs,
leurs personnages, retrouvé avec beaucoup de plaisir le magnifique Gael
Garcia Bernal, que j'avais adoré dans Amours Chiennes, mais je
ne ressentais pas cette sensation que je ressens habituellement en sortant
d'une séance qui m'a plu. Pourtant, je ne pouvais me résoudre à me dire
que j'avais été déçue, et à l'heure où j'écris, j'ai encore du mal à être
aussi catégorique. Peut-être parce que j'en attendais trop, parce que
je voulais être transportée, parce que je suis devenue trop exigeante
par rapport à ce réalisateur que j'aime tant et qui m'a jusqu'à présent
tellement impressionnée. J'aimerais alors avoir un"déclic", saisir quelque
chose que je n'aurais pas saisi lors de la projection du film, et qui
me ferait dire : "Ce film est à la hauteur de ses autres films. Je ne
suis pas déçue." J'attends, je cherche... mais le "déclic" ne vient pas.
C'en est frustrant!
L'ensemble reste flou dans ma tête, je me souviens d'un film "fouillis",
où trop de choses se mélangent, où rien n'est suffisamment clair (mis
à part, bien sûr, les allusions à la corruption du prêtre ; ces scènes
sont justement remarquables car elles arrivent à tout dire, tout dénoncer,
à travers l'implicite seul). Les personnages restent confus, semblent
ne pas se connaître eux-mêmes, se découvrir sans cesse... Mais tout cela
me semble si peu fidèle à ce que j'ai jusqu'à présent ressenti devant
les films du réalisateur espagnol que je serais tentée de revoir ce film,
ne serait-ce que pour confirmer ma présente impression, ou au contraire
pour découvrir ce à côté de quoi je suis certainement passée la première
fois. Avis à suivre !
Audrey
N, 2004
2.
Un peu comme Audrey (voir critique précédente), 48h après, je n'arrive
pas à savoir si j'ai vraiment aimé ce film, et surtout, ni pourquoi. Conclusion
qui s'impose: il ne m'a pas laissée indifférente. Et je devrais rajouter
que je suis sortie de la salle très très émue (mais il faut dire qu'au
cinéma je suis remuée par peu de choses, une vraie fontaine!!)
Côté technique, c'est remarquable, Almodovar maîtrise parfaitement son
art. Tout est dit à travers l'implicite seul. "Les personnages restent
confus, semblent ne pas se connaître eux-mêmes, se découvrir sans cesse...
Mais tout cela me semble si peu fidèle à ce que j'ai jusqu'à présent ressenti
devant les films du réalisateur espagnol que je serais tentée de revoir
ce film, ne serait- ce que pour confirmer ma présente impression, ou au
contraire pour découvrir ce à côté de quoi je suis certainement passée
la première fois" (dixit Audrey).
Pour ma part, je ne comprends pas aujoud'hui pourquoi ce film m'a tant
touchée. Seule explication entrevue : il touche à des registres universels,
le retour sur l'enfance, les amitiés du collège, l'influence du passé
sur le présent ... A travers des situations que peu de nous ont connus
(collège privé, religieux, pour garçons, tenu par un prêtre corrrompu,
homosexuel), l'auteur arrive à remuer des souvenirs d'enfance extrêmement
forts et universels. Je pense que le traitement implicite des situations
réelles (harcèlement sexuel des enfants, relations troubles, ...) permet
à chacun de projeter ce film dans son univers propre. C'est probablement
pourquoi j'ai trouvé ce film très fort et émouvant.
A voir! A ressentir! A méditer!
Béatrice
DV
3.
Je dédie cette critique à mon copain Philippe qui est le sosie de Pedro
Almodovar...
Générique magique...on s'attend au meilleur. Le début est plutôt
réussi et prometteur : cette rencontre entre deux anciens amis d'enfance
séparés par le temps, réunis à nouveau par un manuscrit énigmatique "la
visite"...
Le film part alors dans une enfance blessée et là, Almodovar nous offre
de grands moments d'émotion et de beauté, sachant manier le ralenti, la
musique, les effets de lumière.
Certains diront que c'est un peu facile mais il arrive à dégager ici une
sensualité de l'enfance presque palpable, rare. Les scènes de ces corps
heureux dans l'eau ou courant après un ballon sont les meilleures du film
car il parvient à faire adopter à la caméra et donc au spectateur le point
de vue de ce prêtre sensible au charme des enfants en ne montrant pas
seulement la perversité de cet homme abusé par son désir et abusant du
corps des enfants dont il brise l'avenir. La grande prouesse d'Almodovar
et la force de ce film -qui peut choquer-, c'est qu'il ne montre pas qu'un
prêtre pédophile de plus, mais un homme amoureux d'un enfant, un homme
qui souffre pour lequel, pendant quelques instants au début du film, on
peut même avoir de la compassion. L'acteur est d'ailleurs talentueux pour
parvenir à faire transparaître cette attirance douloureuse qui lui fait
monter les larmes aux yeux quand il entend la voix cristalline de cet
enfant qui l'émeut tant.
La scène où ce même prêtre fait une veillée de nuit et découvre les deux
enfants ensemble dans les toilettes est également fort réussie car un
autre visage de cet homme multiple apparaît, celui qui effraie, celui
qui abuse de son pouvoir, celui qui est injuste. Toute la fragilité de
l'enfance apparaît alors par contraste. Et l'on se met alors à regretter
vivement qu'Almodovar n'ait pas plus centré son film sur ces moments de
l'enfance ...peut-être a-t-il fui malgré lui ce qu'il essayait de retrouver
?...
Après, le film s'égare en se compliquant dans une histoire policière comme
si Almodovar avait voulu faire plusieurs films en un seul. Certes, on
ne s'ennuie pas ; on s'amuse même parfois de certains dialogues ou situations
mais, au bout du compte, cela n'a pas grand intérêt car on n'a pas l'impression
que c'est ce qui a motivé Almodovar alors que, paradoxalement, c'est à
cette partie qu'il consacre le plus de temps.
Alors, oui, Pedro Almodovar est un grand metteur en scène mais La mauvaise
éducation n'est pas un grand film. Retournez voir le superbe Parle
avec elle et le très émouvant Tout sur ma mère pour mesurer
toute la différence qu'il y a entre ces oeuvres.
Béatrice
A-C., 2004
4.
J'ai profité de la fête du cinéma pour aller revoir La mauvaise éducation.
Je me suis dit, si je m'ennuie, je pourrai toujours sortir. Eh bien j'ai
davantage apprécié que la première fois ! J'ai pris le temps de redécouvrir
les personnages, de faire attention à la musique, à la mise en scène,
à l'implicite. et surtout, j'ai fait attention à chaque menu détail, tous
ces détails que l'on ne saisit pas la première fois parce qu'on n'en a
pas le temps. C'est un film qui, à mes yeux, gagne à être revu, et gagnerait
à être étudié. il est trop riche, trop complet pour qu'on puisse le comprendre
en le voyant une seule fois. Comme une personne que l'on ne peut découvrir
et apprécier réellement qu'au bout de plusieurs rencontres. Ce film me
semblait 'fouilli' ; il s'avère étonnamment bien ficelé. Je pensais être
déçue du grand Almodovar, mais je n'avais en fait pas eu le temps d'apprécier
son dernier film. J'étais dépassée par ce scénario complexe, par ces personnages
à faces multiples. J'étais même passée au-dessus du côté 'humain' du père
Manolo, que j'avais bien mal jugé, certainement à cause des préjugés que
l'on peut avoir sur ces adultes qui abusent d'êtres innocents. Lors de
cette deuxième séance, ce personnage s'est révélé sous un tout autre aspect
: celui d'un être qui souffre et qui, loin d'être un bourreau sans pitié,
devient presque une victime. Rien que pour cela, je suis heureuse d'avoir
revu ce film. Je savais que j'étais passée à côté de quelque chose.
Audrey
N, 2004
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