Monstres et compagnie
est une nouvelle création de Pixar, studios d'animation
dont Disney s'est offert les services. Après les deux Toy
Story, ils nous proposent un nouveau film de bonne facture, en tout
cas très drôle. Jouant sur les peurs d'enfant, sans préchi-précha
ni guimauve, le spectacle de ces monstres qui nous ressemblent beaucoup
est très réjouissant, offrant même quelques moments
vraiment hilarants : le court-métrage d'ouverture, et le bêtisier
désormais traditionnel du générique final.
On peut aussi ajouter quelques commentaires sur ce qui sous-tend l'univers
de cette fiction : les héros appartiennent à une immense
entreprise monopolistique qui fournit l'électricité de
ce monde parallèle au nôtre en alimentant les générateurs
de cris d'enfants. La vie des employés semble plutôt agréable,
basée sur une juste compétition entre l'élite des
monstres qui fournissent les cris en effrayant nos chers petits (vous
savez, les créatures terrifiantes qui peuplent les placards et
le dessous du lit de nos pitchounes).
Comment ne pas reconnaître l'Amérique dans cette satire
douce, avec ses tendances isolationnistes et paranoïaques (une
police digne de Brazil traque toute incursion du corps étranger
: la présence d'un bambin pas du tout peureux menace l'univers
des monstres et terrifie (!) ces derniers). Le fonctionnement capitaliste
harmonieux est aussi menacé par les tentations du méchant
chef d'entreprise, qui entend faire exploser ses profits en enlevant
nos charmants bambins pour les torturer.
Vous vous en doutez, le complot sera déjoué par les héros,
mais laissera l'entreprise sans leader. Que faire alors pour sauvegarder
les emplois ? Opérer une reconversion, bien sûr, et revoir
le mode de production. Les scénaristes ne proposent donc pas
la révolution (toujours vue d'un oeil méfiant dans les
films hollywoodiens), mais prônent un capitalisme à visage
plus humain, sans modifier pour autant le fonctionnement de la compagnie
(je ne peux en dire plus sans révéler la fin). Un économiste
trouverait sans doute encore plus de choses à dire sur le fonctionnement
de Monsters Inc. En jouant habilement sur cette petite fable économique,
sur divers registres comiques (splastick, satire), et sur l'univers
de l'enfance, Pixar produit un spectacle de qualité, assez intelligent
et souvent très drôle.
Laurent Goualle,
vu à Pau en 2002
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