Etant en général
sensible à l'humour de Roberto Benigni, je me suis laissé entraîner à
une séance de sa version de Pinocchio, malgré les mauvaises critiques
que j'avais vaguement parcourues. Mes seules connaissances de l'histoire
remontaient au dessin animé de Walt Disney, dont certaines scènes m'avaient
terrorisé dans ma tendre jeunesse.
L'idée originale de Benigni, après tant d'adaptations du
conte de Collodi, consistait à interpréter lui-même
le rôle titre. Ce pari un peu osé aurait peut-être
pu fonctionner s'il s'était écarté du conte pour
apporter son propre délire.
Hélas, le résultat est navrant.
Je concentrerai mes critiques sur l'interprétation, qui est évidemment
le problème central. Et là, Benigni est parfaitement horripilant.
Ses mimiques grossières, son agitation incessante qui d'habitude
me font rire, m'ont ici très vite donné envie de mordre à pleines dents
le dossier du fauteuil devant moi. Geignant constamment, plus guignol
que Pinocchio, il ne comprend pas que jouer les enfants ne signifie pas
tomber dans l'infantilisme. Or, l'hystérie, les gémissements
incessants, la vacuité des dialogues, tout dans ce film nous conduit
à ce stade. Et ce ne sont pas les autres acteurs qui rattrapent la sauce.
Tous en rajoutent dans l'extrême, la niaiserie, avec une palme à la fée,
qui se contente d'arborer son sourire de carton-pâte. Ajoutons que
les autres personnages sont d'une rare laideur, ce qui ajoute à l'inconfort
créé par les dialogues celui des images.
Le décor, à mi-chemin entre le théâtre de marionnettes, la commedia
dell'arte et certains aspects felliniens, ne
rattrape pas l'accumulation des mauvais choix par ailleurs.
"Ai-je donc perdu mon innocence ?" me suis-je demandé en sortant
du cinéma. Non, non, et non ! Je raffole des contes de fées, mais force
est de constater que le projet est totalement raté ; et il me semble
que dès le départ tout cela était une très
mauvaise idée. Enfin, ne désespérons pas, Benigni
nous reviendra pour des délires bien plus savoureux.
Laurent
Goualle, vu à Pau en 2002
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