Adaptation
Etats-Unis
2002
Réal. : Spike Jonze
Avec : avec Nicolas Cage, Meryl Streep, Chris Cooper


1.
Du même réalisateur que Dans la peau de John Malkovich, voici l'histoire d'un scénariste à qui l'on confie la tâche d'adapter un roman profond et honnête au sein d'une industrie hollywoodienne qui veut de l'action, de l'amour et une histoire conforme aux recettes traditionnelles.
Normalement je déteste les histoires sur l'"inspiration de l'écrivain" (cela semble trop facile), mais celle-ci n'est pas mal du tout car elle est racontée de façon originale. Qu'est-ce qui est nouveau? La réalisation (les étonnantes séquences d'ouverture et de fin sur la nature), les personnages (par exemple Nick Cage jouant à la fois un scénariste vieillissant, gras et chauve et son frère jumeau-repoussoir), les idées (les orchidées, la passion, la théorie de l'évolution, l'amour et la séparation) et les dialogues (tout ce qui sort de la bouche des acteurs est divertissant).
Malgré tout, quelque chose me fait hésiter à écrire dans ma critique qu'il s'agit d'un film "génial" ; il m'a divertit mais ne m'a pas totalement enflammé. La chute m'a semblé être un peu trop bien empaquetée, le film semble alors se trahir lui-même, à l'image du personnage principal : incapable d'échapper à son destin, il "grandit", trouve une morale, l'amour et puis des gens meurent au cours d'une poursuite en voiture.
Je recommanderais fortement ce film si je ne lui trouvais en même temps beaucoup de défauts. Là encore, je déteste les histoires du type "Je suis l'écrivain, j'ai un blocage d'écrivain." Je suppose que si vous êtes scénariste vous l'apprécierez peut-être. Le scénariste du film semble avoir beaucoup de talent, un blocage dans l'inspiration et une obsession narcissique pour ses propres névroses. C'est un film sur l'adaptation, d'accord, mais aussi sur la masturbation : physique, émotionnelle et intellectuelle. Il est sans doute drôle de voir un Nicolas Cage gras et à moitié chauve se masturber, d'écouter un scénariste vieillissant se cogner la tête contre sa machine à écrire et faire de touchantes remarques sur sa propre "inadaptation" à la chaîne de l'évolution humaine (il est aussi drôle d'observer son double inversé : une brillante journaliste du New Yorker qui, au milieu des décombres de son brillant mariage, tombe amoureuse d'un rôdeur des marais chasseur d'orchidées un peu louche), mais c'est aussi un peu morbide et triste.
Qu'est-ce que c'est que cette foutue histoire ? Une histoire authentique, je suppose. La question est la suivante : veux-t-on vraiment voir cette réalité soigneusement enrobée dans une fin formatée à l'hollywoodienne? Une certaine adaptation pourrait bien être nécessaire au public avant qu'il ne s'enflamme pour cette étrange fleur des marais. En guise de consolation pour sa trahison de ses principes artistiques, le scénariste introduit de force une fin vaguement triste : Dieu empêche que la fille tombe dans les bras du héros dans la scène finale !... donc, sur le plan de l'intrigue, nous somme obligés d'être légèrement satisfaits, d'une manière qui nous est assez familière (il est possible, probable, qu'elle tombe dans ses bras). C'est un peu comme essayer de faire un hamburger au foie gras arrosé de ketchup à emporter au drive-in : c'est fabriqué avec de bons ingrédients (acteurs, écriture, réalisation) mais comme ça ne correspond pas au format, quand on l'engloutit trop vite, ça laisse une boule dans la gorge et un arrière goût étrange pour quelques jours.

Andrew F.
(Traduit de l'américain)
version originale


2.
Le film de Spike Jonze se caractérise tout d'abord par son originalité poussée à l'extrême.
Cette fois-ci, on se retrouve "dans la peau" d'un scénariste, Charlie Kaufman (Nicolas Cage), en manque d'inspiration alors qu'il doit adapter pour l'écran un roman à succès. Trois histoires s'entrecroisent : celle du scénariste, celle de Susan Orlean (Meryl Streep), l'auteur du roman, et celle du protagoniste de ce roman, John Laroche (Chris Cooper). Ces existences vont être troublées à partir du moment où le scénariste viendra s'immiscer dans la relation qui unit les deux autres.
La qualité des images, notamment celles d'une nature luxuriante, et la capacité à surprendre le spectateur en permanence du film le démarque des productions hollywoodiennes habituelles.
L'industrie cinématographique américaine est d'ailleurs au centre de l'histoire. Nous suivons les errances d'un scénariste dont le travail semble incompatible avec les notions de rentabilité et de spectaculaire promises par Hollywood.
Les jeux d'acteurs sont également un des intérêts principaux du film. Nicolas Cage est méconnaissable en vieux garçon aigri, gros et chauve, ainsi que Meryl Streep en écrivain(e) B.C.B.G. qui devient cocaïnomane après sa rencontre avec Chris Cooper. Celui-ci a été métamorphosé physiquement pour son rôle, ce qui lui a valu dernièrement l'Oscar du meilleur second rôle.
Le tourbillon de l'histoire emportera le spectateur. Les scènes se suivent sans véritablement se ressembler (petit bémol peut-être pour les images de violence, bien que nécessaires…).

Frédéric G.


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