Bref synopsis : Igor est un jeune apprenti mécanicien, son
père Roger impose sa loi et l'oblige à s'occuper des travailleurs clandestins
qu'il exploite odieusement. L'un d'eux, Hamidou se blesse en tombant.
Il meurt faute de soins mais Igor lui a promis de s'occuper de son épouse
Assita.
Analyse musicale
Si on accepte l'hypothèse que la musique " off " entretient un lien
profond avec notre inconscient, notre émotivité, notre affectif et notre
imaginaire, on comprend pourquoi elle est absente dans ce film. Une
telle vacuité musicale n'est pas pour autant vide de sens, je pense
que les réalisateurs ont volontairement supprimé toute possibilité d'évasion
pour nous autres " audio-spectateurs " : nous sommes cloués à une réalité
sordide qu'ils veulent dénoncer et nous n'avons pas d'autre choix que
de les suivre dans cette démarche pendant toute la durée du film. Inutile
d'essayer de rêver de s'évader, même avec ses oreilles.
Très peu de
musiques in dans ce film, Un exemple et sa signification : séquence
analysée : Le père et le fils chantent en duo dans la boîte de nuit
Les réalisateurs nous ont déjà montré que :
-1)l'espace est celui du père (la boîte de nuit)
-2)Les relations humaines sont celles du père (les prostituées) -3)Les
valeurs sociales et la gestion de la sexualité sont celles du père
-4)La musique est ici une " valeur ajoutée " : elle montre à
quel point le père phagocyte le fils et lui enlève toute possibilité
de construire une once d'univers personnel. Il s'agit d'une chanson
qui appartient au répertoire, à la génération et à la culture du père,
le fils la chante avec le père. Il n'a pas accès au monde de
son imaginaire, tout est verrouillé, aucune possibilité de choix personnel.
Il y aura cependant
une exception à cet état de fait : Pour honorer sa " promesse " le fils
enchaînera son père, dans ce choix ultime, crucial et dramatique, il
se libère de sa servitude à l'égard du père(servitude qui a pour effet
pervers d'asservir les travailleurs clandestins)°il libère du même coup
" l'âme " de l'autre père, celui qui est physiquement mort. (nous sommes
carrément dans une dialectique hégélienne)
La présence
mais aussi l'absence de musique ont toujours du sens.
C'est la raison pour laquelle j'invite chacun à écouter avec
attention les musiques qui nous sont " balancées " dans les séries de
m… à la TV. Faites un affront à votre intelligence en vous astreignant
à une telle audition : Il vous suffira de quelques secondes purement
auditives, yeux fermés pour être saisis de l'envie frénétique
de zapper et trouver un autre programme. Dans ce cas très précis, l'absence
de musique serait déjà un signal de subtilité de la part des réalisateurs…
il ne faut trop leur en demander !
Brigitte Boëdec,
décembre 2002.
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