Vierge mise à nu par ses prétendants (La)
(Oh ! Soo-Jung)
Corée du Sud
2000
Scénario et réalisation : Hong Sangsoo
Producteur : Lee Yujin
Directeur de la photo : Choi Youngtaek
Caméra : Choi Seokjae
Ingénieur du son : Yim Dongsuk
Mixage : Oh Wonghul
Musique : Ok Gilsung
Montage : Ham Sungwon
Avec : Soojung : Lee Hunjoo Jaehoon : Jung Bosuk Yougsoo Moon : Sungkeun

 

1.
Je viens d'aller voir le film coréen sur la vierge mise à nue etc. Moi elle m'a mis par terre!

Bof... et encore je manque de superlatifs!

Allez je me permets même un : bof bof... (eh oui, parfois il faut avoir le courage de ses opinions)

Impressionnant comment un mélange : image grain blanc pour faire cinéaste, persos asiatiques décalés mais pas trop pour faire vague réalisateur asiatique novateur, intrigue découpée façon Pulp Fiction poussif ou Alain Resnais nerveux, et du cul, de la boisson, un soupçon d'amour et une bonne critique au Télérama de la semaine, attire la foule des quinquagénaires cinéphiles et autres boutonneux obsédés ou intellectuels (c'est un peu pareil) des lundis après-midi parisiens propices aux tarifs réduits évocateurs de culture pour tous.

C'est très très lent (c'est la deuxième fois dans ma vie que je m'endors au cinéma ! véridique...), ça ne décolle jamais et c'est insupportable lorsque le film recommence une deuxième fois pour nous montrer un second point de vue sur l'histoire. Pendant un moment je repensais au spectacle de Desproges où l'auteur interprète refait le résumé du spectacle pour ceux qui se sont endormis... pas de chance, on a le droit à toutes les scènes (enfin bon elles ont le mérite d'être numérotées donc ça aide un peu lorsqu'on est un peu perdu lors du comptage des moutons...).

Donc, si il pleut, que vous n'avez aucun film à aller voir, mais que bon quand même vous êtes tentés parceque c'est la corée et que vous êtes passionés de la coupe du monde mais n'avez pas pu y aller... eh bien, choisissez la lecture, le tricot ou la pétanque ou toute autre activité qui vous permet d'apaiser cette soif de culture qui vous ronge... car vous risquez de vous trouver comme l'héroïne du film: bloqué dans une cabine de téléphérique sans savoir pourquoi ni comment faire pour vous en sortir (non ça ne finit pas comme les bronzés en plus!)

PS : pour info, les passages les plus longs ne sont pas les extraits des documentaires parascolaires Images d'Ailleurs "mon voyage en Corée: entre modernité grise et passé gelé" mais les scènes de dialogues parfois très très lentes entre le trinome de la mort et du choc des paupières : les deux amoureux de la belle et cette dernière... qui il est vrai est bien jolie mais bon ça suffit pas toujours comme aurait dit Alice Sapritch.

Nicolas P., vu en 2003


2.
Que répondre à une telle descente en flammes (qui me désole tant j'ai aimé ce film)? Je ne suis pas quinquagénaire (ça viendra un jour), je ne suis pas spécialement boutonneux, je n'aime pas être classé parmi les cinéphiles (ça fait secte) et je ne me fie jamais aux critiques de Télérama pour aller voir les films ; cela ne m'empêche pas d'être un ardent défenseur de celui-ci, même si je l'ai vu il y a deux ans et si mes souvenirs ne sont pas aussi vifs (façon de parler) que ceux de Nicolas P.
La Corée est un vivier de jeunes (et de vieux) talents, et le réalisateur Hong Sangsoo en est certainement un des chefs de file. Quelques-uns de leurs films s'intéressent à la narration cinématographique, utilisant toutes les ressources de la mise en scène pour raconter des histoires d'une façon originale. Le chant de la fidèle Chunyang (Im-Kwon-Taek) se coulait dans le moule du Pansori (chant traditionnel), Peppermint Candy quant à lui prenait le récit à rebours.
Quant à La Vierge mise à nu..., elle est dotée d'un système narratif particulièrement étonnant et stimulant pour le spectateur un peu éveillé, qui rappelle en effet ce qui était mis en place dans Pulp fiction ou dans une certaine mesure, Smoking No Smoking (les références de Nicolas sont finalement plutôt flatteuses) dans la mesure où il nous raconte la même histoire (une jeune femme est courtisée par plusieurs hommes) selon différents points de vue. Les scènes de la première partie reviennent, parfois apparemment identiques, parfois totalement différentes, d'autres scènes s'y rajoutent, mais rien dans ce marivaudage n'est jamais totalement pareil.
Le début est certes un peu austère et déroutant (le regard sur la vie quotidienne en Corée n'est pas des plus réjouissants), mais dès lors que le film "repart", porté par la subjectivité de chacun des protagonistes, il suscite la participation active du spectateur qui observe avec attention les détails qui changent dans ce qui devient un jeu stimulant et drôle. Un vrai puzzle en trois dimensions que l'on reconstruit avec jubilation et drôlerie, n'en déplaise aux grognons. Ne manquez pas cet excellent exercice de style qui m'a laissé un sentiment vivifiant.


Laurent Goualle, vu à Nantes en 2000

retour liste