Le secret des poignards volants
2004
Réal. : Zhang yimou
Avec : Zhang Ziyi, Andy Lau, Takeshi Kaneshiro


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Hero

 

A couteaux tirés
Présenté à Cannes, le dernier film de Zhang Yimou (réalisateur de Hero) offre une variation intéressante du film d'arts martiaux de la vague post Tigre et Dragon. Précision d'importance son titre original devait être The Lovers, ce qui place bien l'ambiance: loin de l'héroïsme sacrificiel de Hero, Zhang Yimou se penche sur l'amour. Son film possède d'indéniables qualités. La photographie est tout simplement époustouflante grâce à l'usage judicieux des filtres. Le bleu de la cour de danse est remarquable et tranche avec le vert quasi intégral de la forêt. La beauté des plans est quasi hypnotisant (cf le duel dans la neige rappelle l'esthétique des estampes japonaises reprise dans les films de sabre nippons). Les combats évitent l'écueil d'être une pâle copie de Tigre et Dragon. Chi Siu Tung nous épate une fois encore. Moins aériennes que celles des films précédents, les scènes d'arts martiaux donnent l'illusion d'un mouvement perpétuel : aucune pause, les personnages combattent en se déplaçant. Chi Siu Tung ne tombe pas dans le piège d'une chorégraphie répétitive qui pouvait lasser dans Hero. L'usage du numérique donne pleinement satisfaction pour suivre les dagues volantes et atteint même des sommets lors du combat de la forêt de bambous. Hommage à King Hu et à Histoire de fantômes chinois, le duel de branche en branche, l'envolé des soldats, égalent visuellement le face à face Chow Yun Fat/Zhang Ziyi de Tigre et Dragon. Cette chorégraphie spectaculaire n'est d'ailleurs pas réservée aux scènes d'action : l'étrange jeu de l'écho permet à Zhang Ziyi d'effectuer un ballet, élégant, vif, enivrant à mi-chemin entre danse et le Kung Fu où chaque drapée de sa robe évoque une figure onirique.
L'histoire est à la fois un défaut et une qualité du film. Qualité car à la différence de Hero¸ les combats n'étouffent pas l'intrigue. Les personnages sont très intéressants et bénéficient de la qualité de leur interprétation en particuliers de Takeshiro. Zhang Ziyi peut enfin élargir son registre : son personnage de sabreuses aveugle rappelle Zatoichi, sa tenue d'homme est une allusion aux ambiguïtés sexuelles des grandes figures féminines des production de Hong Kong ; l'évocation de sa nudité rappelle la dimension érotique des 1ers films de sabre. Andy Lau confirme sa forme actuelle et joue à merveille son personnage à multiple facette limite schizo qui n'est pas loin de celui de flic infiltré dans Infernal Affairs. L'émotion de la 2nde partie de film est crédible : on se plait dans ce jeu de miroir à décrypter la vérité. Simplement les rebondissements multiples de la seconde partie du film viennent embrouiller quelque peu la réalisation. Le rythme tombe, les révélations sont mal orchestrées, les scènes intimistes obscurcissent l'intrigue et seule l'interprétation sans faille des acteurs permet au film de tenir. On en oublie même le sort de la secte des poignards volants. Yimou se focalise sur le triangle amoureux mais sa mise en scène trop statique n'arrive pas à faire écho aux déchirements passionnels. Il reste que le film reste une divertissement à gros budget remplissant pleinement son rôle. Loin d'être une pâle copie de Tigre et Dragon ou de Hero, il propose un renouvellement du film de sabre à qui ne manque qu'une touche de zen.

Hervé L.


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